La thèse de Jacques Hénin étudiant en histoire du 18e, archivée en 1978 aux presses universitaires de Caen section Histoire, fait état de plusieurs documents très intéressants qui éclairent la destiné du Père André et de l’un de ses enfant de chœur Yann Trévien.
Le Père Jules André de Catadrille après la fuite de Blanche fut sévèrement tancé par Antoine du Beau-Près et sans doute révoqué de l’île et de ses fonctions. Il tenait une paroisse et était le principal représentant de l’église sur l’île. Las Le comte avait apparemment d’importantes relations dans le haut clergé Vendéen et nous retrouvons le père André au monastère de la Rochelle où il réside 2 ans comme pensionnaire avant d’être rappelé à Paris où il va servir des aumôneries secondaires.
Cette destitution n’est pas à mettre sur le compte de ses activités pédophiles qui, à l’époque, n’existent « en théorie » pas. Nous avons tout de même quelques traces de correspondances entre des dames de Paris se plaignant « des cours religieux qui fanent et font perdre appétit à mon enfant » et chez cette autre « de blessures intimes dont ma petite fille se plaint d’avoir contracté du curé » qui prouvent que l’homme d’église n’avait pas ralenti « ses forfaits ».
Les premiers procès condamnant des prêtres pédophiles datent des années 80 en plein XX ème siècle aux Etats-Unis, il est donc improbable que le père André ait été inquiété en quoique ce soit dans ses activités criminelles.
Il sera décapité sous la révolution pour collusion avec la noblesse, on sait l’aversion qu’éprouvaient les révolutionnaires pour l’église en général et les persécutions anti-cléricales furent monnaies courante durant cette période.
Jacques Hénin pourtant met en lumière un personnage qui va peser lourd dans la condamnation du prêtre. Ce dernier en effet n’occupait pas une place prépondérante dans le clergé, bien au contraire, il était relégué à des postes subalternes depuis sa destitution, ses relations avec la noblesse étaient quasiment inexistantes, ses « amies » de l’île l’ayant promptement oublié après sa révocation. C’était donc un moine anonyme dans un monastère aux portes de Paris.
Pourtant il eut droit à une arrestation d’exception. « La garde révolutionnaire des sans culottes conduite par le camarade Yann Trévier se rendit au lieu dit du « monastère de Gentilly » et procéda à l’arrestation de l’ancien curé de l’île » Hénin montre à partir de cette mention dans un registre de la police révolutionnaire que ce « Trévier » non seulement conduit l’arrestation de l’ancien prêtre mais instruit et fait partis du réquisitoire contre celui-ci. Dès lors quelques jours suffisent à condamner et exécuter le pédophile.
Qui est ce Yann Trévier ? Hénin retrace à force de déductions croisées et de quelques rares bribes historiques la vie de Trévier ou Yann Trévien, il n’a que 24 ans lorsqu’il s’attaque aux barricades de Paris et chargent les préfets. Il vient de Vendée et plus exactement d’une île au large des côtes, comme beaucoup de jeunes, il tente sa chance sur le continent, il va sans doute découvrir la rudesse de la vie des itinérants agricoles, l’injustice, la pauvreté et la famine qui vont composer pendant plusieurs années son quotidien. Il se rallie bien vite aux premiers soulèvements paysans, mais devant les massacres, les pillages et surtout la récupération que le clergé et la noblesse de l’époque vont faire de ces révoltes populaires, il déchante. Dès lors Jacques Hénin ne sait s’il monte sur Paris en suivant la trace du prêtre de son enfance dont il aurait retrouvé la piste en Vendée ou si c’est le hasard, une fois sur Paris qui le fait découvrir le prêtre caché et fomenter sa vengeance.
La thèse passionnante de Hénin nous décrit aussi un autre versant fascinant de la personnalité de Yann « l’amant caché ». Ce jeune paysan sans terre, sans attache et sans famille est un magnifique jeune homme, une série de lettres datées de 1785 à 1787 de la Comtesse Sophie Fabiès-Championnière à une amie parisienne la Baronne Eugénnière de Rocadine nous décrit un jeune amant fougueux, beau comme apollon et brave comme Persée, une autre correspondance, celle-ci de Rachel Amando-Pellissy lui déclame des poèmes dont le « beau ne pourra malheureusement jamais lire ne sachant. » Yann Trévien est-il juste un jeune amoureux fougueux ? ou un beau manipulateur ? quoi qu’il en soit, sans le sous, il va vivre aux crochets de belles galantes richissimes et souvent mariées, et toutes beaucoup plus âgées que lui. Hénin s’interroge ; ces aventures amoureuses dans les milieux riches en ont sans doute fait ce que l’on nomme aujourd’hui « un gigolo » mais au delà de l’aspect « opportuniste » tout cela lui a servi à monter sur la capitale et sans doute à intégrer les rangs d’une bourgeoisie manipulatrice de la révolution et… beaucoup plus certainement ; à retrouver le bourreau de son enfance.
1 commentaire:
ça donne envie dis-donc…
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